Résumé de lecture : "AU COEUR DE LA RÉVOLUTION, LES LEÇONS D'HISTOIRE D'UN JEU VIDÉO"
Par David Boulanger
Aujourd’hui
il est question d’un résumé critique de lecture du livre « Au cœur de la
Révolution, les leçons d’histoire d’un jeu vidéo » paru en 2015 sous
l’éditeur Vendémiaire. Le sujet principal de ce livre est le jeu Assassin’s
Creed Unity (Ubisoft, 2014), qui d’ailleurs est encore super pertinent et
visuellement beau en 2022. Le livre est écrit en deux parties distinctes, une
première par Jean-Clément Martin (historien, professeur à l’Université Paris
1), et une seconde signée Laurent Turcot (historien, professeur à l’Université
du Québec à Trois-Rivières, aussi connu pour ses apparitions médiatiques au
Québec et sa chaîne YouTube « L’histoire nous le dira »). Pour garder
le contenu de ce résumé plus clair et bref, j’ai décidé de regrouper les propos
des deux auteurs dans 3 catégories. La première est un bref survol de la
polémique autour du jeu Assassin’s Creed à l’époque (dans l’introduction du
livre). Ensuite, il est question du jeu pour l’enseignement et la diffusion du
savoir en général. Enfin, je vous présenterai quelques informations plus
spécifiques à propos de Paris à l’époque de la Révolution (1789) en lien avec
le jeu selon les auteurs.
Polémique
Le sujet de
la polémique autour de la sortie du jeu, bien que ça ne représente pas ce en
quoi consiste le livre, est quand même important à souligner. Martin et Turcot
soulignent la stupeur de Jean-Luc Mélenchon qui considérait que Robespierre
était dénaturé. D’autres plus experts en la matière comme Hervé Leuwers (Université
Lille III) et Michel Biard (Université de Rouen) ont signé dans un supplément
du Nouvel Observateur (14 novembre 2014) un texte soulignant les défauts du jeu
(ils n’ont pas tort, Martin et Turcot aussi sont critiques). Enfin, la
polémique a même traversée l’Atlantique pour être cité dans le New York Times
par Dan Bilefsky (Video Games Meets History, and France Rebels Again)
ainsi que dans The Atlantic par Kabir Chiber (Let Them Play Assassin’s Creed?).
Jeu et
enseignement/diffusion du savoir
D’un côté,
Martin reconnaît que « …le divertissement ne fait pas toujours bon ménage
avec la vérité historique… », mais qu’il s’agit d’un support médiatique
maintenant incontournable (p. 22), D’ailleurs, pour les enseignants d’histoire,
il souligne l’aspect nécessaire des référents cinématographiques, mais aussi le
jeu vidéo qui a l’avantage de l’immersion et un statut plus actif (non plus
seulement spectateur, p. 22) parce qu’il sert de moyen d’appropriation ludique (p.
23). Il n’hésite pas à mentionner les musées, qui eux aussi utilisent des
« … écrans interactifs pour offrir des parcours ludiques à leurs visiteurs
sur le modèle des Serious Games… » (le concept de jeu sérieux ne
sera pas abordé ici) (p. 24). Turcot, dans sa partie, ajoutera que le jeu ne
peut remplacer un livre d’histoire (p. 123), mais qu’on peut y retrouver une
profondeur historique quand même et, espèrent-on, intéresser les joueurs à
cette période historique (dans ce cas-ci Paris à la fin du 18e
siècle) (p. 62). Il ajoute que la « vulgarisation n’est pas une pratique
vulgaire. Qu’on le veuille ou non, les jeux vidéo, comme les romans historiques
existent. Plutôt que les dénigrer, apportons-leur un éclairage et entrons avec
eux dans l’espace public » (p. 124).
Représentation
historique
Les
auteurs, l’un après l’autre, soulignent des détails de la réalité parisienne de
l’époque, que ce soit positif ou négatif. Là réside un bon outil pour aider à
décoder l’époque de la Révolution française pour s’en servir pour en apprendre
plus ou pour se servir du jeu comme outil d’enseignement. Du côté des aspects
positifs, ils mentionnent la représentation du bruit ambiant, la Bastille
(extérieur), les rues bondées, la Bièvre, l’augmentation du nombre de prisons
pour enfermer les contre-révolutionnaires (en plus du fait qu’elles sont
pleines et avec de mauvaises conditions), etc.
De l’autre
côté, plusieurs aspects sont aussi mal interprétés ou manquants. D’abord, la
ville est trop propre : pas de matières fécales partout (animaux et
humains), l’eau de la Seine a presque l’air potable alors qu’on y retrouve une
tonne de déchets et l’utilise pour la livraison des biens, lavoirs, etc. Rapidement,
d’autres défauts historiques que les auteurs soulignent sont l’utilisation de
la capuche par Arnaud (au lieu de le cacher, cela mettrait une cible sur son
dos), la représentation des prostituées, les numéros (adresses qui devraient
arriver seulement une dizaine d’années plus tard), l’alimentation (utilisation du
pain, types de boulangers, bouchers, etc.), simplification des types de
carioles, manque de chevaux… Enfin, les personnages principaux sont aussi limités
à des « …caricatures autour d’un trait considéré comme représentatif
de leur identité… » (p. 45-46). Le plus notoire est le roi Louis XVI
lui-même, plus démontré comme les ragots diffusés par ses jeunes frères (balourd,
influençable, incapable de satisfaire…) que ce qu’il était réellement : un
monarque de 1,9m (environ 6 pieds 3 pouces) qui a été éduqué toute sa vie,
parle plusieurs langues et tentait d’éviter les conflits (p. 46).
Bon, alors
que peut-on retirer de ce livre de Jean-Clément Martin et Laurent Turcot? Bien
que la sortie d’Assassin’s Creed Unity en 2014 était plus que les notoires
bogues initiaux du jeu, mais bien aussi un jeu qui a été accompagné de
controverse. Aussi, le livre démontre que le jeu peut servir de média
d’apprentissage, s’agit de bien savoir ce qui est historiquement à point, un
peu anachronique ou mal interprété. Bref, la lecture du livre est intéressante
pour connaitre le contexte autour du jeu ainsi que dans le jeu. En plus, si
vous n’avez pas encore joué à AC Unity, il est disponible sur PS4-PS5, Xbox
One-Xbox Series S/X et PC pour quelques dollars (ou Euros) de nos jours.
Bibliographie
Martin,
Jean-Clément et Turcot, Laurent (2015). Au cœur de la Révolution, les leçons
d’histoire d’un jeu vidéo. Paris, Vendémiaire.
Bilefsky, Dan (2014). Video Game Meets History, and France
Rebels Again. New York Times. Disponible au lien suivant: Video
Game Meets History, and France Rebels Again - The New York Times (nytimes.com)
Chibber, Kabir (2014). Let Them Play Assassin’s Creed?. The
Atlantic. Disponible au lien suivant : Assassin's
Creed: Unity's Depiction of the French Revolution Is Very Controversial - The
Atlantic
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